En neuf saisons comme salarié du Racing Club de Strasbourg, Serge Cayen est devenu plus qu’un simple acteur administratif. Aujourd’hui, il suit avec beaucoup de désarroi la lente agonie du club.

« Neuf saisons qui m’ont fait presque oublier trente ans dans la Police »

Après avoir œuvré pendant de longues années dans les services de la Police où il était chargé entre autre de la gestion des évènements importantes, il a pris la direction de la Meinau à la fin des années 90 en tant que Directeur de la sécurité et du site de la Meinau. Un métier qui lui aura permis de vivre des moments intenses mais aussi difficiles comme en ce moment. Naturellement, ses premières pensées vont aujourd’hui aux quelques salariés qui continuent à œuvrer dans l’ombre pour le bien du club. Dirigés par qui ? Justement, depuis plus d’un an il manque un commandant dans le bateau Racing. « Cornélie n’est pas l’homme de la situation, il ne connaît rien au football, rien en administratif et encore moins en ressources humaines ». Le constat est affligeant et les conséquences néfastes. « L’homme de la situation était Julien Fournier. Il avait un passé à l’OM et était très à l’écoute ».

« J’ai dis les quatre vérités à Hilali »

Serge Cayen et nos chroniqueursDepuis le départ de l’ancien adjoint de Pape Diouf à Marseille, le Racing se retrouve être dirigé à vue, souvent depuis Londres, sans réelle ligne de conduite. « J’ai dis les quatre vérités au Président, ce n’est pas une honte d’être incompétent dans un domaine, encore faut-il le reconnaître ». Avant de partir à la retraite, il a oeuvré à sa succession avec la formation de Christophe Krebs. Depuis, il n’est jamais resté loin du club, devenant même membre d’un conseil de surveillance « où il ne s’est jamais rien passé. On nous faisait lecture de chiffres qui étaient souvent faux par maladresse … ». A plusieurs reprises, il aura essayé de mettre en garde l’actionnaire majoritaire sur l’image qu’il véhiculait à Strasbourg et dans le monde du Football en lui rappelant « qu’il se faisait que des ennemis en Alsace alors que l’on est une terre de caractère et donc que c’était à lui de s’adapter à nous, et non le contraire ». Volonté identique dans le relationnel vis à vis des personnes extérieures. « Il fallait renouer les contacts avec les partenaires et les supporters. On ne peut pas gérer un club en ayant des ennemis partout ». Insensible à ses propositions, le résultat ne s’est pas fait attendre. « Je ne connais aucune personne qui m’ait dit du bien de ces gens là depuis qu’ils sont arrivés ». Du coup, à force d’essayer de raisonner le « Mozart de la finance », il a été mis à la porte du conseil de surveillance. « Lors d’une assemblée générale, Jafar Hilali a demandé ma révocation, sans m’en avoir informé avant, j’ai préféré démissionné ».

« Pourquoi pas le placer sous tutelle ? »

Ces méthodes se font hélas ressentir dans tous les domaines. « Dans les bureaux, il y a eu un manque de respect pour les salariés, il y en a même une qui est en congé maladie depuis plusieurs mois, c’est dire le malaise ambiant ». Peu respectueux de ses salariés, Jafar Hilali avoue sans retenue que « çà l’amuse de torturer ces gens là » et se retrouve aujourd’hui dans une situation financière insoutenable après plusieurs mois de gestion calamiteuse du club alsacien. L’analyse de l’ancien Directeur de la Meinau est sans détour « Ce n’est pas possible qu’un seul homme, qui pète un plomb, décide seul de la survie d’un club centenaire. Pourquoi ne pas le placer sous tutelle ? ». La question a le mérite d’être posée car les preuves s’accumulent pour celui qui enterre jour après jour l’avenir du RCS sans finalement n’avoir jamais dépassé la ligne blanche du hors la loi. « Sous couvert de l’anonymat, il y a eu des lettres qui ont été envoyées aux instances compétentes, plus que le harcèlement moral, c’est le manque de respect, les salariés se sentent délaissés ». Des documents ont également traîné dans les bureaux du club comme celui dans lequel le financier « voulait mettre des musclés de Paris pour faire régner l’ordre dans les tribunes, car soit disant le service en place n’était pas assez sévère ». Cet épisode coïncide avec sa volonté de fermer le quart de virage du kop où il a même imaginé dire que ce dernier était en travaux. Outre ses attaques contre les salariés et les supporters, il n’oublie pas également sa gestion des affaires dans un club en manque de liquidités. « On a besoin d’argent et il donne Régis Gurtner à Boulogne ».

« Proisy était entouré d’incompétents »

Serge CayenCas similaire avec la vente avancée de la clause de revente de Kévin Gameiro dans laquelle le club a perdu 1,5 M d’€. Cet argent manque justement aujourd’hui dans les caisses pour terminer la saison. Jafar Hilali n’a donc pas hésité à faire appel aux autres actionnaires mais « comment voulez-vous qu’ils abandonnent leur compte courant compte tenu de l’instabilité du personnage ? Ils ont été méprisés et déconsidérés depuis son arrivée ! ». Outre la dernière présidence en cours, Serge Cayen n’a pas hésité à revenir sur la douce descente du club depuis sa vente par la mairie en 1998. « Dès le départ, le club était mal parti avec Mac Cormack. Patrick Proisy était un grand naïf qui venait tous les quinze jours la tête enfarinée se faire cartonner. Il aimait ce club mais il était entouré d’hommes incompétents, à commencer par Bernard Gardon (qui avait jeté les trophées du club à la poubelle) puis suivi par Claude Leroy qui a fait un tord immense au club ». Et pourtant pendant cette période américaine, les moyens financiers étaient présents. « Marc Keller m’a dit un jour que s’il avait eu la moitié de ce qu’avait eu Leroy, il aurait pu faire de grandes choses à Strasbourg ».

« Ginestet n’était plus en état de diriger »

En tant que Directeur de la sécurité, il avait également à sa charge les relations avec les supporters. « J’en profite pour les saluer. Il y a eu des frictions mais c’est toujours resté dans une relation d’hommes ». Tout le contraire de ce qui passe actuellement entre l’actionnariat et les salariés. Enfin, dernier président avant l’arrivée des londoniens, Philippe Ginestet a laissé pour lui une image positive au club. « Les salariés gardent beaucoup de plaisir de discuter de l’époque Ginestet, il est resté correct avec les salariés et les supporters, même quand ces derniers lui ont qu’il devait partir ». Par manque de chance et de conseil valable, le club a poursuivi sa dégringolade. « Des gens sont intervenus auprès de lui, des conseilleurs qui n’étaient pas les payeurs. Las, il n’était plus en été de gérer le club. Il aimait ce club et avait vérifié avant de vendre qui en serait le Président. Julien Fournier lui inspirait confiance ». La suite on l’a connaît hélas. Aujourd’hui, même à la retraite, il garde un regard constant sur son club de cœur, jusqu’à attendre la mise en ligne des journaux tard dans la nuit. Attaché au Racing Club de Strasbourg, il espère aujourd’hui des jours meilleurs, comme un vrai supporter.