Vendredi 10 juin 2011, l’horloge de l’église sonne comme chaque jour ses douze coups de midi. Seulement aujourd’hui, à chaque son de cloche, le Racing Club de Strasbourg s’efface un peu plus du monde du football professionnel. Dernier coup, dernier soupir, le Racing disparaît. Fin de 78 années d’histoire …

Quel avenir ?

RCS / Bayonne : dernier match professionnel après 78 annéesLa mine défaite, le regard noir et la voix tremblante, pour la première fois l’actionnaire majoritaire Jafar Hilali est apparu marqué par un an et demi de règne au micro de France 3 Alsace. A la sortie d’une audience de 45 minutes à la DNCG, il a confirmé l’abandon du statut professionnel du club centenaire. Ne perdant pas le nord, celui qui n’a pas vu un match au Stade de la Meinau pendant sa présidence, n’a pas manqué une nouvelle fois de mettre la pression sur d’hypothétiques acheteurs en leur indiquant la date butoir fixée à ce midi par la DNCG pour un ultime sauvetage. Hypothétique car cela fait plusieurs jours que les candidats à la reprise avaient fait, eux aussi, le deuil de leurs projets, circonspects par le montant astronomique demandé par le financier londonien (aux alentours de 6 à 7M d’euros). A une journée de la fin du football professionnel à Strasbourg, il est finalement logique de n’avoir eu aucun repreneur assez fou pour payer quatre fois le montant de la vente réalisée en décembre 2009 par Philippe Ginestet alors qu’entre temps le club a chuté d'une division, va perdre son statut professionnel, ses joueurs, son staff, son stade et son centre de formation. Tout quoi.

Dix ans de travail aux oubliettes

Le centre de formation, celui là même encore classé parmi les dix meilleurs de France la saison passée et qui a vu passé les Bellaid, Gameiro et autre Gueye, fermera ses portes dans les prochains jours. Au micro de Planète Racing, François Keller avait gardé l’espoir d’un revirement de dernière minute. Croyant, il espérait une issue positive à cette situation de crise sans précédant qui, comme il l’a rappelé, « va mettre par terre dix ans de travail ». Dix ans comme le temps qu’il faudra pour reconstruire un Racing Club de Strasbourg où il ne reste aujourd’hui que des ruines en passe d’être évacuées par une probable liquidation judiciaire qui elle terminerait d’enterrer ce qu’il reste encore debout à ce jour.

Accusés, levez-vous !

Les responsables, tout le monde les connaît. Ceux qui ont voulu se servir au lieu de servir, ceux qui ont profité d’une institution centenaire encore en Ligue 1 il y a quelques années comme une monnaie marchande au grand dam de l’amour propre de ses supporters. Eux n’ont peut être pas perdu d’argent dans cette histoire, les supporters eux ont perdu plus qu’un simple rendez-vous du samedi soir du coté de la Meinau. Car aujourd’hui, c’est une tranche de vie, une passion sans retenue et un amour que l’on vit jour et nuit qui va disparaître. On peut changer de femme, de voiture, de maison mais jamais de club. Cet amour, nous l’avons dans le cœur et dans le sang, ce sang bleu qui coule dans nos veines et qui nous a fait vivre des émotions folles depuis des décennies. Les règlements de comptes ne font peut être que commencer.

Et maintenant ?

On savait le club sous respirateur, mais ce sont aujourd’hui les supporters qu’il faut mettre sous perfusion. Car outre les salariés et joueurs, victimes de la folie des grandeurs de quelques personnages sans inspiration, la situation actuelle touche plus loin que les présents des travées de la Meinau. La disparition de la carte des clubs professionnels attriste même nos plus « fidèles adversaires » de l’autre coté des Vosges, triste de voir partir un monument centenaire et des derbies animés. La capitale de l'Europe perd aussi sa première vitrine sportive. Les détracteurs de l'Euro 2016 peuvent s'en réjouir.

Silence, on ferme

Les prochaines semaines risquent d’être longues et moroses du coté des sites de supporters. Car eux aussi, que vont-ils devenir ? Eux aussi possèdent des serveurs prévus pour la Ligue 1. Suivant l’évolution dans les jours à venir et dans le meilleur des cas, ils pourront continuer à suivre une équipe amateur en CFA. Dans le pire, et on connaît ça depuis plusieurs saisons avec des montées ratées pour un point, ils seront les suiveurs virtuels d’un club qui n’existe plus. Les temps seront durs et les saisons longues pour espérer un jour retrouver l’élite du football français. Le match de gala prévu ce dimanche par la Fédération des Supporters ne doit pas être une rencontre posthume mais peut être, et on l’espère, celui d’une nouvelle ère.