Décidément il se passe toujours quelque chose à la Meinau et cette finale de la Coupe de France féminine du 30 mai 2018 entre le Paris Saint-Germain et l’Olympique Lyonnais restera éternellement dans les mémoires collectives et individuelles. Rétro.

Record d'affluence pour une finale explosé

« En 20 ans à la Meinau, je n’avais jamais vécu ça » souffle humidement vers une heure du matin un agent de sécurité qui œuvre à la Meinau. Il faut dire que cette finale est rentrée, de part son scénario, dans la rayon des matchs que l’on oubliera jamais, pour des bonnes mais aussi mauvaises raisons. En cette chaude soirée de mai, tout avait pourtant bien commencé. Malgré une date et un horaire dignes de la League Europa, et les play-offs de la SIG, les 12 480 spectateurs ont battu hier soir le record d’affluence pour une finale de Coupe de France féminine. Le précédent record avec 8 789 datait du 15 mai 2016 au stade des Alpes de Grenoble lors de la finale Lyon contre Montpellier (2-1).

Ensuite, la rencontre marquait également les retraites sportives de quatre joueuses internationales : Laure Boulleau (PSG), Camille Abily, Corinne Petit et Elodie Thomis (OL). Un moment fort pour elles même si malheureusement qu’une seule aura le sourire à la fin de la partie. Face à l’armada lyonnaise, et sous les yeux de Jean-Michel Aulas et l'absence des hauts dirigeants parisiens, les championnes d’Europe mettaient la pression d’entrée sur les Parisiennes.

Mais ce sont ces dernières qui vont ouvrir le score par Katoto après un super enchaînement coup du sombrero / frappe (16e). Laure Boulleau ne manquera pas d’éloges après le match pour sa protégée : « Marie-Antoinette Katoto peut devenir l’une des meilleures joueuses du monde dans les prochaines années ! ». La mi-temps était sifflée sur ce court avantage pour le PSG (1-0).

Match arrêté

Sous les ordres de Bernard Mendy, dont c’était la première sur le banc en l’absence d’un Patrice Lair en partance, les Parisiennes tenaient le bon bout pour freiner les offensives adverses en début de seconde période. On joue la 58 minute et 32 secondes quand le match va basculer. Florence Guillemin, l’arbitre de la rencontre, arrête la partie sous un déluge de pluie. Les deux équipes rentrent aux vestiaires. Chacun cherche à connaître le règlement. Nous aussi. « Un match commencé peut être définitivement arrêté en cas de circonstance particulière (intempéries, violences). Cette interruption est à la discrétion de l’arbitre. Par ailleurs, si les périodes pendant lesquelles un match est momentanément arrêté dépassent 45 minutes à partir de l’heure de début du match (y compris les périodes de mi-temps), l’arbitre a également l’obligation d’interrompre définitivement le match. Un match arrêté définitivement avant son terme doit être rejoué, sauf disposition contraire édictée dans le règlement de la compétition ». En clair, il y a deux scénarios au terme des 45 minutes d’interruption : soit la partie reprend et le match continue à 1-0 à l’avantage des Parisiennes, soit la partie s’arrête définitivement et elle devra être rejouée à 0-0.

Si Jean-Michel Aulas s’est d’abord prêté au jeu des selfies dans les tribunes alors qu’ils pleuvaient des seaux d’eau sur la Meinau, le ton est sensiblement monté lorsque le corps arbitral est revenu inspecter la pelouse sous les applaudissements des quelque 5000 spectateurs encore présents vers 23h15 et souhaitant la reprise du match. Si le PSG mettait la pression pour que la rencontre reprenne, Lyon émettait des réserves sur la préservation de l’intégrité physique de ses joueuses. Mais l’OL, Jean-Michel Aulas en tête, a finalement dû se résoudre à reprendre la partie notamment à cause d’un planning empêchant tout report rapide à une date ultérieure, tout en n’oubliant pas les engagements internationaux voire de vacances de ses joueuses … « Il a même été évoqué de la rejouer en début de saison prochaine. Vous vouliez quoi ? Que je continue à m’entraîner tout l’été ? » en rigolera en zone mixte Laure Boulleau qui n'a pas souhaité rentrer en tout fin de partie alors que la tension était au maximum.

But refusé

Finalement, sur les coups de 23h30, le compteur du tableau d’affichage de la Meinau repartait sous une pluie battante, non sans difficultés pour des joueuses soumises à œuvrer sur un marécage. Drôle de sortie pour un gazon qui va être terrassée dès lundi sur 60 cm pour faire place pendant l’été à une toute nouvelle pelouse hybride. Les minutes s’égrainaient, Lyon poussait mais Paris résistait, fidèle à sa devise « Fluctuat Nec Mergitur » (« Flotte mais ne coule pas »).

Probablement le seul match qui s'est joué sur deux mois différents

On joue finalement la 93ème minute de jeu. Ultime corner pour les Lyonnaises. Endler, la gardienne du PSG s’écroule … sur sa propre coéquipière, le ballon termine sa course dans les filets. Égalisation ! Non, car l’arbitre sifflait une faute. Cruelle pour des Lyonnaises, rouges de colère suite à cette décision incompréhensible. Quelques secondes plus tard, l’arbitre sifflait la fin du match et celait la victoire parisienne (1-0). Il était 0h05 ... et on s'est finalement évité les prolongations et tirs-aux-buts.

Paris peut laisser éclater sa joie et la partager avec ses supporters qui n’ont eu de cesse de les encourager. Les scènes de plongeons sur une pelouse détrempée se succèdent. Les journalistes pestent ; ça sera compliqué de mettre l’épilogue de cette curieuse finale dans le « canard ». Bruno Salomon et Sabrina Dellanoy exultent au micro de France Bleu Paris car Paris a stoppé la série de six victoires consécutives des Lyonnaises dans cette Coupe de France.

Quelques minutes plus tard, les coéquipières de Camille Abily, très émue, recevaient leur médaille d’argent. Leur saison restera, une nouvelle fois, exceptionnelle. Les Parisiennes, elles, peuvent jubiler : elles ont fait tomber l’ogre lyonnais.

Ne changez rien Mesdames

Alors qu’avec l’heure avancée elles auraient beaucoup de difficultés à revenir en avion sur Lyon dans la nuit, Sarah Bouhaddi, blessée, exhorte le staff à rester sur la pelouse lors de la remise du trophée par respect pour leur adversaire. C'est là aussi que l'on voit les grandes joueuses. Sous un ultime déluge, elles peuvent enfin laisser éclater leur joie pour la photo souvenir devant des objectifs détrempées.

A l’image de Laure Boulleau, chacune savoura ce moment encore de longues minutes sur le carré vert de la Meinau avant de faire vibrer les murs de l’habituel vestiaire des Bleus par un puissant cri de victoire. Photos, félicitations, embrassades, … en tout simplicité clôtureront cette incroyable soirée où le football féminin aura été mis en lumière et qui devra encore vivre longtemps avec cette fraîcheur et cette simplicité. Mais un peu moins de pluie ...